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Tag - rock lunaire

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dimanche, octobre 27 2024

KLONE – The Unseen


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Dans une veine ascensionnelle et de profondeur dont il a le juste contraste, Klone est un groupe de Rock Metal Progressif qui a su se démarquer par une singularité discographique élégante et étoffée.

Les albums “Duplicate” en 2004 via Musicast Distribution, “All Seeing Eyes” en 2008 et “ Black Days” 2010 via Season Of Mist, “The Dreamer's Hideaway” 2012 via Klonosphere tracent leur chemin tout en étant moins prévisible au fur et à mesure, jusqu’à ce “Here Comes the Sun” en 2015 via Verycords où les racines metal se déplacent avec un rock éthéré, depuis 2019 les albums « Le Grand Voyage » et « Meanwhile » via Kscope entreprennent un sens plus progressif, avec comme ligne de vie une intensité toujours sensationnelle. Chaque album de Klone est unique et " The Unseen " via Pelagic Records est son 10ème album studio.

Composé du chant profond de Yann Ligner, du compositeur Guillaume Bernard à la guitare, du feu follet Aldrick Guadagnino à la guitare, Enzo Alfano à la basse, Morgan Berthet à la batterie et de Matthieu Metzger au Saxophones / Piano / Keyboards, c’est dans la brume d'une voie lactée que Klone se transe lui-même en étant ténèbres de lumière, déterrant la magie délicate de la vie de ses corolles musicales arachnéennes. Il porte dans sa peau des ailes noires et dans un nid fait d'os et d'épines perchés dans les cieux il se nourrit de baies vénéneuses dont l’ivresse nous revient tout au long de cet opus onirique.

Le groupe joue entre ombre et lumière, entre flou et clarté, cette espace poétique dont chaque dessein allume un flot d’images palpables dans notre interprétation et introspection dans laquelle l’on pourrait s’y dissoudre à l’intérieur, et à la fois que l’on ne peut capturer pour se les approprier. Le groupe peint une musique sereine et complexe, douce et effarouchée, non préservée des duretés de la vie, à fleur de d'eau comme un lotus, concentré dans le moment d’une éphémère plénitude. 

Il y a toujours ce contraste juste et équilibré, une dose létale qui permet de ressentir de la profondeur et un faisceau lointain qui guide nos émotions vers un ailleurs, que d’autres nomme voyage.

Les titres sont immersifs comme une eau profonde lumineuse et toujours en mouvement, les mélodies plongent dans le corps musical comme les pétales d'une rose se ferment au crépuscule. La beauté d’une écorce et de tout son temps de maturité viennent s’entourer des vestiges des sonorités de Klone, avec ses vertiges.

Yann le chanteur du groupe a déclaré à propose de " Interlaced " : « Ce titre révèle plusieurs facettes de notre musique et résume en quelque sorte l'état d'esprit général de l'album.Les paroles décrivent ces moments qui nous ramènent à notre jeunesse, ces situations qui, par le jeu, nous permettent de retrouver notre âme d'enfant. »




samedi, octobre 19 2024

NICK CAVE & THE BAD SEEDS – Wild God


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Nick Cave, le poète dont le songwriting hanté peuple son onirisme ténébreux revient de la nuit avec dans les mains le cœur d’une nouvelle lumière à travers un philtre d’amour. L’Australien a donné à son existence une œuvre d’art dont l’écriture est une musique. Crois-le !

Depuis l‘album « Skeleton Tree » (2016) et la perte de son fils Arthur, l’homme plonge dans la mystique comme un buvard dans les eaux de l’obscurité. En 2022 il perdait son fils ainé Jethro. Les derniers opus étaient une lutte de l’âme dans une nuit sans lune avec un pieu dans le cœur.

Pourtant cette beauté gothique que les cimetières baroques honorent dans leur sépulture offrait tout ce que l’Australien s’efforçait d’en expliquer les incohérences qui dominaient sa vie ; la douleur, le tourment et la confusion en une musique céleste traduit de la noirceur de l’âme.

Nick Cave a traduit la consécration du deuil en portant les ailes d’une congrégation poétique et musicale. Recherchant dans la musique les sédiments qui ont des ailes cachées pour les faire émerger à tous ceux qui ne peuvent cacher les cicatrices à la place des ailes d’autrefois. Le vide que l’on comble par des occupations de l’esprit, puis que les fantômes prennent en refuge nostalgique, griffant leur spleen sur la peau à vif, Nick saigna l'amour dans une quête de rédemption, naufragé sur une île existentielle il trouvera des Robinsons capables de faire émerger de l’écume ce radeau de la méduse. Ecorché, claudiquant tout en recréant la vague d’émotions ressentie sous la surface de l’eau bénite.

Avez-vous une idée du nombre de cris qu’il a dû réprimer ou évaporer dans l'espace pour ne pas mourir de chagrin ?

D’ailleurs il posera la question dans le documentaire « One More Time with Feeling » de 2016 : Quand suis-je devenu un objet de pitié ?

Mais il ne veut pas que nous le sauvions. Il veut que nous soyons à ses côtés pendant qu’il se sauve. Je pense que c’était davantage de la piété, tant le chanteur et parolier avait su avec son complice musicien Warren Ellis lier dans l’absolu du deuil une félicité de hauteur poétique face au drame, au vide, à l’incandescence des serpents de la vie.

Ce 18ème opus est résiliant de dix morceaux qui offrent une rédemption cathartique. « Wild God » est un « disque joyeux peuplé de morts » selon l’icône australienne, c’est le premier album studio à présenter la pleine participation des Bad Seeds depuis Skeleton Tree (2016), avec la présence de Colin Greenwood, bassiste de Radiohead.

Le groupe porte ses fétiches, ses cartes de diseuse de bonne aventure usées aux angles comme le bord d’une vague contre la craie des vents violents de l'automne. Des mélodies aux lèvres de brume et de glace, brulant sous la langue de Nick Cave comme un discours amoureux dans les banlieues de l'enfer. Les larmes de son âme sont surchargées de grappes de lumière, enduites de l'obscurité mystérieuse de la lueur des mots, et d’un spleen à la tendresse immense. Les chœurs gospel viennent féeriques remplir la cathédrale musicale. Le titre “O Wow O Wow (How wonderful She Is)” est un hommage à Anita Lane, muse, compagne de Nick et parolière avec le groupe The Birthday party.

La voix majestueusement baryton de Nick transformée en une grâce dorée et cramoisie d'octobre témoigne à elle seule de la profondeur du crooner. De sa poésie il en sort une ode symphonique ésotérique mise en abime pour la beauté envoutante de ce nectar temporel en suspens.

Nick Cave témoigne de son amour poétique mis en lumière par des musiciens talentueux. Il n’y a que des vieux, c’est vrai, mais chantre d’une sagesse mise à l’épreuve par leur existence, vivante d’une expérience acquise, capable de traduire le rugissement mystérieux que votre corps entend dans le silence, comme votre sang gronde dans son existence. La grandiloquence cinématographique du son permet de poser des travellings sur les métaphores. Tout ceci mérite une écoute approfondie et marque un profond respect.

Après le silence l’inexprimable se mesure en musique, et dans ce labyrinthe lorsque vous trouvez la sortie vous venez d’accomplir un bout de votre chemin d’âme.

« L’acte de création est une tentative d’entrer dans un royaume mystérieux. Un désir de transcendance. Ce que nous créons nous permet de partager des aperçus d’un paysage intérieur, qui dépasse notre compréhension. L’art est notre portail vers le monde invisible. » Rick Rubin




mardi, octobre 15 2024

KALANDRA - A Frame Of Mind


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Le groupe Norvego-Suédois Kalandra s’est fondé en 2012 pour un premier album « The Line » en 2020 avec le mood Myrkur, Eivør, Wardruna comme étoile polaire.

Leur folk nordique a su catalyser une musique aérienne et chamanique là où ce nouvel album intitulé « A Frame Of MInd » est davantage impétueux dans sa dynamique, alliant du post-rock-alternatif pour des titres plus enlevés, rappelant leur chanson « On The Run » de l'album précédent. Mais aussi une part plus sombre, notamment le tire « Segla » en Norvégien et l’âpre « Bardaginn » en Islandais.

La batterie d’Oskar Johnsen Rydh ajoure des textures rythmiques dans l’harmonie de la paire des guitaristes Florian Döderlein et Jogeir Daae Maeland, qui elle-même mélodise pour la chanteuse Katrine Stenbekk, entre feu et glace où l’on retrouve cette impression de grandeur, de clarté dans un écrin de délicatesse dans son chant.

Rêve, contemplation, inquiétude et angoisse, apaisement et sérénité entre ethereal wave, dream pop, Kalandra trouve un lead limpide, des chœurs mystiques, une aube ambiant, un torrent de rock qui s'abat, et toujours cette ode folk simple et dépouillée. Le guitariste Jogeir Daae Maeland est également compositeur de musique de série TV, « Surviving the Cartel » (2022), « Litteraturfest på Lillehammer » (2022).

Kalandra a tourné avec A.A. Williams et Leprous, et l'on en ressent le ressac, la façon dont son propos musical s'est étoffé de tempêtes, comme pour mieux affronter son côté obscur et des mouvements plus saillants. Apportant plus que transportant en première écoute, tant la profondeur sombre de Tool créer des tensions, fourmille d'une lumière crépusculaire, ajourant la mystique sans jamais la clore dans un new age pastoral dont aurait pu craindre la redondance. Romantique sans la fleur bleu de « The Line » Kalandra ouvre dans ses abysses un spleen rock alternatif plus dense, où le son s'épaissit, danse de feu où la neige nordique fond d'une nouvelle chaleur qui réchauffe tout autant le cœur à coup de lames de fond. La portée progressive des guitares propulsées parfois dans la dissonance aux roulements de tambours percutants en quête mélodique façonne un album révélateur de la maturité du quatuor, tout comme de son évolution.

La prêtresse incantatoire Katrine a expliqué : « l’album peut être décrit comme un voyage introspectif sur les expériences de la vie et la façon dont elles façonnent notre perception du monde ».

Vous retrouverez aussi les phases atmosphériques, les envolées d'harmoniques vocales, la culture folklorique norvégienne, et cette ouverture vers un public plus large.





lundi, octobre 7 2024

40 WATT SUN - Little Weight


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Patrick Walker a construit la musicalité de 40 Watt Sun en débutant en 2011 avec l’opus « The Inside Room » sur un shoegaze doomy dépouillé, puis a suivi avec comme sujet le deuil, la douleur et la perte du précédent « Perfect Light » de 2022, cet album de slowcore parle pleinement d'amour, de gratitude et de guérison. Il s'agit du quatrième album des Britanniques qui enveloppent complètement en 45mn, une brièveté qui va finalement à l’essentiel.

Composé de Patrick Walker (chant, guitares, compositions et paroles), Roland Scriver (Guitares basses), Andrew Prestidge – (Batterie), le trio a développé ses textures avec douceur, fruit d’une maturité à donner à percevoir et à équilibrer l’ensemble. « Little Weight » a été enregistré aux Holy Mountain Studios de Londres en décembre 2023. L'ingénierie et le mixage ont été réalisés par Chris Fullard (Sunn O))); IDLES; Ulver), qui a été assisté de Stanley Gravett, avant qu'Adam Gonsalves ne masterise les morceaux à Portland, dans l'Oregon. La pochette de l'album est signée Tekla Vály.

Six morceaux émotionnels qui dégagent une lourdeur et propagent une chaleur sombre. Il y a là la noirceur concise de Madrugada avec cette alternance rock de veillée funèbre, de pure nostalgie, de spleen texturé avec des couches superposées de guitares formant un doux clapotis océanique de confort mélancolique. Les mélodies répétitives sont créées sur un ton sombre et introspectif, tout en permettant aux couches de s'étendre jusqu'à ce qu'elles atteignent leur apogée.

40 Watt Sun étire une profondeur touchante vers la veine d’Anathema et de Red House Painters pour une immersion dans le chant de Patrick Walker comme attraction émotive. Illuminé à des endroits porteur de lumière et d'espoir, le disque s'immisce progressivement et de plus en plus profondément dans votre être.

Ce disque émiette des particules de rêves avec des rayons de fin d’été mélancolique !




jeudi, octobre 3 2024

Welcöme to Nørse


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La musique est une flèche. Il faut viser juste pour atteindre son but.

Dimanche 29 septembre 2024, à Toulouse, salle du Rex, organisé par l’asso Noiser, mon épouse Samantha et oim en mode lover venons de Castres, 72 km plus à l’est, 1h30 de route, aller. L’air ambiant est doux pour cet été indien maussade, d’un doré que la lumière douce et lourde renvoi avec mélancolie. Quand nous arrivons la salle est déjà bondée et la première partie vient de débuter.

C’est Lili Refrain (since 2007), multi-instrumentiste, compositrice et interprète Italienne, basée à Rome. Elle est seule à bord imprégnée d’énergies rituelles dans un navire chamanique qu’elle construit dans un art semi-lyrique pendant 45mn. J’avais déjà assisté à sa prestation lors du Hellfest 2022.



Elle construit ses chansons à partir des sons superposés par un looper pour harmoniser guitare électrique, rythmique sur tambour, chant et des boucles en temps réel, sans utiliser d'ordinateur ni de pistes préenregistrées. Sa représentation théâtrale du rite confère répétition minimaliste qui au fur et à mesure des différents apports amène à de nouvelles atmosphères, mélodies, pour voguer dans la transe avec elle, et ça tangue en tous sens. Les lumières sont attrayantes et mettent du relief au concert de Lili. Le concert doit se vivre comme une expérience viscérale et cathartique, et c’est vrai qu’aux confins du psychédélisme, transe folk, pagan métal, entre hypnose et exaltation avec la catalepsie d’un opéra lyrique, c’est à la fois un rite, un concert et un spectacle. Elle catalyse un son impressionnant qu'elle parvient à créer de son océan brumeux et tribal. Elle remplit quasiment tout l’espace sonore avec son chant, sa voix est puissante, l’on peut l’inscrire dans cette variation new-age où Björk, Lisa Gerard de Dead Can Dance, et pour la version française la chanteuse Camille, officient). Elle est prise et éprise pleinement dans l’exaltation de son art et son magnétisme est palpable. C’est son emprise de louve romaine, de prêtresse préchrétienne. Ensorcelée et ensorcelante, dans ses yeux couverts de peintures rouge l’on distingue le styx.

Elle pèle le cœur de sa musique comme une grenade, nous l’offre les paumes tournées vers l'extérieur pour y croquer dedans à pleine bouche, rouge de sang.


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Mais c’est redondant, car la structure similaire et minimaliste de son approche restreinte (elle est seule) car même avec un looper et autres instruments, c’est aussi monocorde qu’un gosse qui te demande 400 fois « C’est quoi ça ? ». Ça vous semble vache, mais c’est l’effet que cela m’a fait, à force.

Je reconnais entièrement la performance et l’art de Lili Refrain, de plus elle témoigne de cette bienveillance 2.0 que tous les kikouyous de la planète pratiquent en clignant des yeux tout en penchant la tête, elle est sympathique et attachiante. Elle a prononcé quelques mots en Français dans ce drapé de R tout aussi charmant que prononcé par Monica Bellucci.

Le mysticisme et l'érotisme sont des concepts différents qui parlent de la même chose au fond. Ils arrivent à leurs conclusions d'une manière différente, mais à la fin la conclusion est la même, qui est le désir humain d'échapper aux choses terrestres et d'entrer dans un état transcendant. Lili Refrain est une artiste qui sans enfreindre les lois musicales pratique une musique qui tient davantage de la performance, même si elle marque sa présence, elle n'a pas l'aura de Kalandra, mais elle arrive à cet état de transcendance assez violent pour que cela devient un choc esthétique, sonore et visuel.



Après la fin de Lili Refrain les clopeurs ont fui vers l’extérieur, nous en profitions pour nous rapprocher de la scène. Il y a des gens qui se considèrent comme uniques, géniaux, spéciaux...Et tous les autres, qui le sont, mais en silence. Être artiste, c’est guérir pour toujours ses propres blessures et en même temps les exposer sans cesse. C’est nourrir sa passion et l’entendre crépiter féroce, forte, pleine de feu, plus fort que ses peurs. Entre les deux, il y a une communion.


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KALANDRA est un quatuor norvégien fondé en 2012, il puise ses racines dans la folk nordique mélancolique, tissant des mélodies éthérées dans des paysages musicaux bruts, aériens.

Pendant 1h30 d’un set enchanteur, gracieux, attachant, touchant, planant dans ces ivresses vertigineuses où les mélodies s'étendent en ligne sans fin, le long d'une baie Scandinave, l’on s’immerge dans le calme et un paysage intérieur où Kalandra murmure que l'aube se lève continuellement comme les étoiles qui brillent et scintillent dans la voie Lactée.

La mauvaise personne te trouvera en paix et te laissera en morceaux. La bonne personne te trouvera en morceaux et te conduira vers la paix…C’est dans ce refuge qui envahit l'âme et aspire chaque parcelle des promesses échangées sous les étoiles jamais éteintes que le concert touche à ce point.

D’un toucher doux contre des cordes de plumes et de bois, une excellente structure de l'ensemble des deux albums sera jouée. De leur nouvel album “A Frame of Mind” sorti en septembre 2024 le groupe explore un côté plus obscur, fragile de leur univers, mais aussi plus vivifiant avec l'apport d’une nouvelle énergie, il jouera les titres ‘’I Am’’, ‘’The State of the World’’, ‘’Segla’’, ‘’Are You Ready ?’’ Et en rappel ‘’Bardaginn’’chanté en islandais.

De leur excellent précédent opus plus aérien “The Line” sorti en octobre 2020 le quatuor interprétera ‘’The Waiting Game’’, ‘’Slow Motion’’, ‘’Naïve’’, ‘’Borders’’, ‘’Virkelighetens Etterklang’’, ‘’Ensom’’, ‘’It Gets Easier’’, ‘’Brave New World’’.

Le groupe interprète toujours la cover ‘’Helvegen’’ de Wardruna et leur instrumental ‘’Bukkehorn jam’’ où Jogeir Daae Maeland le guitariste jouera dans une sorte de cor en bois de cerf la mélodie principale.

Katrine Stenbekk au chant est un diamant brut, sorte d’Elizabeth Fraser de Cocteau Twins. En maîtresse de cérémonie elle enveloppe le concert d’une beauté diaphane tissant des paysages sonores d’une douceur salvatrice et remplit de plénitude, d’émotions troublantes, d’une pureté soyeuse. Ses lèvres séraphines dansaient au milieu des nuages qu’elle portait en elle, avec son chant épris d’une nature féroce et à la fois gorgée d’une quiétude de mousse. Les chansons tamisées qui ont commencé délicatement se terminaient avec beaucoup d'emphase. Florian Döderlein Winter joue parfois avec un archer sur sa guitare en une présence fantomatique, comme Jónsi de Sigur Rós, groupe dont la sensibilité se ressent dans la musique de Kalandra également. Le batteur Oskar Johnsen Rydh a une frappe plus abouti, je l’ai trouvé bien meilleur, et ses parties ramènent toujours en plus d’une rythmique un essor mélodique riche.


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« Il existe un langage bien plus ancien et plus profond que les mots. C'est le langage des corps, du corps sur corps, du vent sur la neige, de la pluie sur les arbres, de la vague sur la pierre. C'est le langage du rêve, du geste, du symbole, de la mémoire. Nous avons oublié cette langue. Nous ne nous souvenons même pas qu'il existe. » Derrick Jensen

Kalandra le parle couramment, et cela nous relie à une puissance ancienne. L’on est bercé tout le temps avec, par cette intensité brumeuse dont la présence palpable émerge haut au-dessus des vallées et des collines, le regard penché sur des jonquilles dorées à côté d’un lac où glisse un ruisseau se réfugiant sous les arbres, flottant et dansant dans la brise. Kalandra joue de grâce et de beauté, nous éloignant de notre vie quotidienne en étant au cœur des mystères de la vie, bercé par la mousse sur les rochers, par tous les éons et tous les ordres du temps. C’est un voyage sonore où aucun diable n’est autorisé à franchir l'orée de cette forêt. C'est un havre qui laisse le temps de se mouvoir pour contempler sa propre nåture fleurir en soi, capable de nous retenir pour s’ancrer, tellement difficile de faire décrocher les gens de leur besoin/consommation sociaux-virtuelle, c’en est presque miraculeux. Kalandra nous enracine avec un nouveau feuillage et nous fait ressentir une sensation d’étrangeté ineffable, mais pure. Tous ces points d'ancrage permettent de nous stabiliser loin des tempêtes de la vie qui font rage.

J’ai trouvé la chanteuse Katrine plus affable, moins timorée que lors du précédent concert du 21 novembre 2023 à la salle Altigone de Saint Orens. Parfois elle s'en allait derrière les deux guitaristes, secouant la tête dans une danse enjouée avec les vagues musicales qui dansaient autour en joie, avec ses feuilles étincelantes. Et nous ressentions cette danse comme la caresse d’être une fougère dans un sous-bois scintillant de lumière.


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L’on boit à la source de quelque chose de pur car sacré. J'ai retenu mon souffle comme nous le faisons parfois pour arrêter le temps lorsque quelque chose de merveilleux nous a touché. Kalandra peint son dessein de vastes territoires éthériques dans ses prières, de blessures inavouables avec la tristesse des choses secrètes, aux mouvements tendres, à tout ce qui nous plie et nous déploie, et nous accompagne comme on laisse une poignée de terre avec ses graines. 

L'imagination est un vaste désert de possibilités. Nous sommes chacun capables de jouir de cette extase. Pour vraiment la vivre, vous devez récupérer votre propre sensibilité pour répondre à vos besoins et désirs uniques en œuvre d'art. La musicalité ouatée de Kalandra, la clarté de son aura, de sa puissance ancienne est un câlin mélodique, une neige éternelle de pureté en concert, elle captive sous la langue humide de ces psaumes post-rockien comme un nouvel amour implanté, qui flâne dans vos entrailles en un torrent de lave élégante et de corde sensible. Ce fut un concert dans ce qu’il y a de plus céleste et féerique.



Setlist

I Am

The Waiting Game

The State of the World

Slow Motion

Naive

Borders

Segla

Virkelighetens Etterklang

Bukkehorn jam

Ensom

Are You Ready?

It Gets Easier

Helvegen (Wardruna cover)

Brave New World

Rappel : Bardaginn

Merci à Lili Refrain, Kalandra, Noiser, le Rex Club, au public venu nombreux.


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lundi, septembre 23 2024

MONO – Oath


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« J'ai toujours été attirée non par une beauté extérieure quantifiable, mais par quelque chose de profond, d'absolu. De même que certaines personnes ont un amour secret pour les orages, les tremblements de terre ou les pannes d'électricité...Faute d'un meilleur mot, appelons cela le magnétisme. » Haruki Murakami

MONO a pour ces 25 ans d’existence sorti le 14 juin « OATH » qui a été produit par Steve Albini mort le 7 mai 2024 à Chicago.

La vie humaine est une rosée passagère, une bougie dans le vent. MONO retourne dans son exploration sonique et poétique dont ce 12e album pose le thème du temps qui compose la vie et à la façon d’en tirer le meilleur parti.

Toujours pétri dans forme de dualité lumineuse et de noirceur fiévreuse avec la production soignée, ‘’atmosphériquement’’ épurée et pleinement moteur d’élévation de Steve Albini, tout comme en 2004 avec leur opus “Walking Cloud and Deep Red Sky, Flag Fluttered and the Sun Shined”.

En 25 ans le quatuor est passé de météorite en une étoile de splendeur. Ce qui vous attend c’est un bain de douceur, de soie mélodique, un raffinement de bonté, de beauté contemplative dont Mono originaire du Japon en caresse l’arborescence tout comme la quintessence. Entre aurore boréale et crépuscule ensoleillé la délicatesse musicale est omniprésente. Les sommets enneigés ne sont là que pour vous faire contempler et ressentir un air ambiant chargé d’Amour et de lumière.

« Nous vivons avec un vœu qui n'a pas changé depuis que nous sommes enfants. Écoutez le vent chanter. Nous faisons partie de l'univers. Nous savons déjà ce que nous devons faire et quelle est la chose la plus importante dans la vie. » – Takaakira 'Taka' Goto.

Ce post-rock orchestré par la symphonie des violons, violoncelle, trompette, trombone et cor Français ouvre les veines de sa palette musicale à la résonance euphorique. Composé de Takaakira 'Taka' Goto – Guitare, Tamaki - Basse, Piano, Yoda – Guitare et Dahm – Batterie, l’opus se gorge de la rosée sur des pétales soniques, des rêves humides, et vient envouter l'éphémère dans une amorce pour nous faire ressentir la pousse mélodique éclore dans sa propre intimité d’arômes.

MONO a convaincu depuis longtemps avec sa musique cinématographie, de boucles sonores fantomatiques en poésie obsidienne les tous contemplatifs honorent cette élégance spleenétique avec le réconfort que l’on puise dans le détail troublant d’une vision. Les titres cristallisent un expédient pour le voyage, sa pureté est un exemple, devenant au fil d’une déambulation pensive que le corps reçoit avec quiétude un oxymore, un cadeau, un fantasme, une utopie, une nécessité, une envie, une nostalgie, navigue comme un nomade inconscient errant dans les pensées, et toujours dans la mélodie du cœur.

Peut-être que vous trouverez rébarbatif, lénifiant cette musique dont l’action fait œuvre de contre-feux, pour moi elle élève et fait donc grandir, elle fait naitre l’indispensable saveur méditative avec ce que la sérénité illumine en soi en apothéose.

泣いて暮らすも一緒、笑って暮らすも一緒 - Naite kurasu mo isshô waratte kurasu mo isshô - « Le temps d'une vie est le même, qu'on le passe en pleurant ou en riant »




vendredi, août 23 2024

ALCEST - Les Chants de l'Aurore


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Le duo composé de Neige (Chant, guitare, basse, claviers) et de Winterhalter (Batterie) prolonge avec « Les Chants de l'Aurore » via Nuclear Blast Records, l’imaginaire shoegaze pour exalter sa spiritualité musicale.

Première fois que j’ai entendu ‘’Alceste’’ cela devait être dans la pièce de théâtre de Jean Baptiste Poquelin « Le misanthrope », rien à voir avec le duo, ni à entendre d’ailleurs.



Comme tout en chacun Alcest fait son voyage dans un dédale initiatique, et lui s'est accompli dans l’imaginaire de l’ésotérisme. Il faut souvent se confronter à ses plus vils démons dans l’obscurité pour voir apparaître la lumière, ainsi Neige a fui la peste noire pour trouver sa voie et son chant du cygne avec Alcest, avec laquelle le duo a pansé sa mélancolie lunaire en flottaison autour de l'amer pour un shoegaze solaire, ramenant dans son écume l’amour de la lumière.

Alcest a fini par nous mener sur une piste parallèle fasciné par l’alchimie shoegaze, loin du paganisme occulte. Œuvrant tel un médium « spontané » avec une musique méditative, enivrée d’éclat et de beauté.

Le titre phare de cet album est « Flamme Jumelle », dont Neige a expliqué : “Malgré son côté plus accessible, ce titre est le plus personnel de l’album. Flamme Jumelle évoque la notion de perte et la difficulté de faire face à l’absence d’une personne que l’on aimait profondément. Qu’il s’agisse d’un membre de la famille, d’un ami ou d’un partenaire. D’un point de vue plus spirituel, le titre fait référence à la possibilité que certaines âmes soient connectées dans cette vie et dans l’au-delà, de sorte que la séparation est temporaire et n’est qu’un concept mortel.”

Je me permets pour le vivre qu’une flamme jumelle c’est deux moitiés du même tout, c’est une connexion stimulante, curative et intense de l’âme avec une autre appelée « âme miroir », ce lien karmique pousse les deux êtres à raviver les blessures les plus profondes chez l’un et l’autre, à guérir et à encourager à être plus complet dans votre propre être.

Ce qui est avéré avec cet album c’est qu’Alcest s’est libéré d’‘’avoir’’ été pour briller dans l’être, avec le pouvoir de faire briller sa propre lumière.




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